13 novembre 2015 : petit-déjeuner du Club de l’Audace avec Son Excellence Sir Peter RICKETTS, Ambassadeur du Royaume-Uni en France
Contexte :
Le Premier Ministre britannique David Cameron a adressé le 10/11/15 une lettre au Président du Conseil Européen, Donald Tusk, concernant les réformes qu’il souhaite pour l’Union Européenne en amont du référendum qui sera organisé en 2016/17. Il a également prononcé un discours sur le même sujet au cours duquel il a clairement exprimé sa conviction que ces réformes sont indispensables, réalisables et dans l’intérêt de tous, et que l’avenir du Royaume-Uni est au sein d’une Union Européenne adaptée au 21ème siècle.
Compte rendu du petit-déjeuner :
Le 13 novembre dernier, Son Excellence Sir Peter Ricketts est intervenu dans le cadre du Club de l’Audace pour échanger avec les membres sur la situation économique du Royaume-Uni et de l’Union Européenne ainsi que sur l’urgence d’une réforme.
Depuis l’arrivée de David Cameron comme Premier Ministre du Royaume-Uni, le déficit du pays a été divisé par deux en cinq ans, avec un objectif de le ramener à 0 à l’horizon 2019-2020. En quelques chiffres, le Royaume-Uni a un taux de chômage estimé à 5.4% pour 2016 et un taux de croissance pour l’année 2016 estimé à 2,4%. Ces indicateurs traduisent un assainissement de l’économie du pays qui s’est fait à travers une double politique : d’une part, la réduction des impôts sur les sociétés mais également sur les revenus, et d’autre part une réduction des dépenses publiques, due notamment à la suppression de près de plusieurs centaines de milliers de postes de fonctionnaires sur la durée de la précédente législature (2010-15). Si ces réformes internes ont été difficiles à mettre en œuvre, elles ont néanmoins été possibles grâce à une réelle volonté de simplification administrative, d’une politique d’attractivité et à un encouragement des initiatives entrepreneuriales. Outre la mise en place d’un dispositif d’apprentissage avec les grandes entreprises, le programme d’investissement dans les industries d’avenir au sein de secteurs tels que la pharmacie, l’aéronautique ou la robotique, est un investissement de long terme de l’Etat britannique, qui aura permis d’attirer de nombreux investisseurs étrangers.
Face à ces bons résultats, les Britanniques pensent que certaines des réformes menées en interne ayant porté leurs fruits pourraient être transposables et applicables à l’ensemble de l’Europe. L’Europe est de plus en plus impopulaire au Royaume-Uni et les multiples crises survenues ces dernières années n’ont pas aidé. Les citoyens britanniques n’ont pas eu l’occasion de s’exprimer depuis 40 ans, et entre temps, l’UE a évolué et changé. Aujourd’hui, David Cameron estime que les Britanniques ont le droit de se positionner sur le maintien ou non de leur pays au sein de l’Union Européenne. Son objectif est de proposer un certain nombre de réformes à l’UE non seulement dans l’intérêt des Britanniques mais plus largement dans l’intérêt de tous les Etats-membres, et dans un second temps d’appeler les Britanniques à voter en faveur d’un maintien du Royaume-Uni au sein de l’UE.
Tout d’abord, sur le volet « Compétitivité », alors que les secteurs des services, du digital, et de l’e-commerce prennent du retard en Europe par rapport aux Etats-Unis, il convient de repenser le marché unique en réglementant moins et mieux. A cet égard, le Royaume-Uni salue les propositions de la Commission Juncker en matière de simplification des réglementations et d’encouragement de la croissance. Le marché des capitaux qui permet de nouvelles sources de financements pour les entreprises européennes, et notamment les PMEs, doit également être approfondi.
Concernant le volet ‘Gouvernance économique’, il convient de mieux articuler les relations entre les pays de l’Euro-zone et les autres Etats-membres qui n’en font pas partie. Si les premiers doivent continuer leur intégration, à laquelle d’ailleurs le Royaume-Uni ne s’oppose pas, bien au contraire, les seconds (comme le Royaume-Uni) doivent également voir leurs intérêts protégés.
L’Union Européenne doit rester une union à devises multiples, et ce, sans discrimination entre les monnaies. Il convient également de mettre en avant un principe de transparence entre les Etats.
S’agissant du volet « Souveraineté », les Britanniques ne veulent pas d’un modèle fédéral pour l’Union Européenne et souhaitent se détacher de l’expression « une union sans cesse plus étroite » figurant dans les traités. Le gouvernement britannique souhaite également donner plus de pouvoirs aux Parlements nationaux dans le contrôle a priori des projets de régulation de la Commission via un système de « carton rouge » renforcé.
Enfin, sur le volet « Migration », le Royaume-Uni soutient le principe de libre-circulation des travailleurs et reconnait les opportunités qu’il permet. Cependant, le Royaume-Uni veut lutter contre les potentiels abus liés à cette libre-circulation, notamment en ce qui concerne l’accès des migrants intra-européens aux « in-work benefits » (c’est-à-dire les aides de soutien aux salaires bas). Cela vient en complément de réformes menées au niveau interne par le gouvernement britannique. L’objectif du Royaume-Uni n’est bien évidemment pas de créer une quelconque forme de discrimination, mais plutôt de mettre en place un système équitable et d’affecter les aides là où elles sont le plus utiles.
Le Royaume-Uni souhaite trouver un accord lors du Conseil européen de février afin de pouvoir organiser un référendum avant l’été 2016.
A propos de Sir Peter RICKETTS :
Sir Peter Ricketts est né en 1952. Il a étudié la littérature anglaise à l’Université d’Oxford et a débuté sa carrière au ministère britannique des Affaires étrangères en 1974.
Après des affectations à Singapour et auprès de l’OTAN à Bruxelles, Sir Peter Ricketts devient directeur adjoint du cabinet de Sir Geoffrey Howe, avant d’être envoyé à Washington. Il a notamment suivi le dossier de Hong Kong. De 1995 à 1997, il est conseiller pour les affaires européennes, économiques et financières à l’ambassade de Grande-Bretagne à Paris, avant de retourner à Londres.
En 2000, il est détaché au Bureau du Conseil des ministres en tant que président du Comité mixte du renseignement et est nommé directeur politique au ministère britanniques des Affaires étrangères.
En juillet 2003, Sir Peter Ricketts devient le représentant permanent du Royaume-Uni auprès de l’OTAN, à Bruxelles.
En 2006, de retour à Londres, on lui confie la fonction de secrétaire général du ministère britannique des Affaires étrangères et de chef des Services diplomatiques britanniques.
En mai 2010, Sir Peter Ricketts devient le premier Conseiller pour la sécurité nationale du gouvernement britannique.
Sir Peter Ricketts prend ses fonctions d’ambassadeur du Royaume-Uni en France en février 2012.